mercredi 11 septembre 2013

Littérature : "Une Nuit Auprès de Lupa" par Marine Lafontaine.

                                        Bibliovore compulsive, je vous présente régulièrement quelques livres en rapport avec l'Antiquité romaine, aussi bien des romans que des biographies ou des essais. Aujourd'hui, j'innove un peu puisque je voudrais vous parler d'un auteur qui n'est pas encore publié - mais à mon avis, ça ne saurait tarder...

                                        Marine Lafontaine écrit comme elle respire - elle noircit des pages depuis qu'elle est en âge de tenir un stylo. Elle m'a contactée suite à un de mes articles, et c'est comme ça que j'ai découvert le blog (http://marinelafontaine.blogspot.fr/) de cette lycéenne de 17 ans. Elle y publie régulièrement des articles où elle présente ses coups de cœur, distille ses conseils littéraires mais, surtout, propose des textes de fiction sur des sujets variés. De courtes nouvelles, des poèmes, mais aussi des romans entiers que, chapitre par chapitre, elle donne à découvrir à ses lecteurs. Et si la compulsion de l'écriture n'est pas forcement liée au talent, Marine allie les deux : la jeune femme est tout simplement bluffante.

                                        J'ai immédiatement été happée par son style d'écriture, très visuel mais plein de poésie, et la manière dont elle parvient à donner vie à ses personnages. Il y a de l'humour, de l'émotion et beaucoup d'érudition dans les textes de cette jeune femme, influencée par l'univers de la fantasy. Marine excelle en particulier dans la réécriture des mythes antiques qu'elle aborde sous un angle différent. Ce que l'on pourrait qualifier d'impudence devient, par la modernité et la fraîcheur qu'elle parvient à injecter à l'histoire, malice et originalité. Plus qu'une relecture, il s'agit d'une réinterprétation plus intime, où la finesse psychologique n'a d'égale que la pertinence de l'analyse. Sa "Médée" est extraordinaire, et son "Éros Et Thanatos" ne l'est pas moins.

                                        J'ai rapidement songé que j'adorerais accueillir sur mon blog un de ses textes, et je lui ai donc proposé de rédiger une nouvelle sur un sujet de son choix - avec pour seule exigence qu'il présente un lien avec l'Antiquité romaine. Il ne lui a pas fallu une semaine pour m'envoyer la nouvelle que vous allez lire... Je suis d'autant plus fière de publier ce texte qu'il concentre l'essentiel des qualités de Marine. J'espère sincèrement qu'il vous donnera envie de vous rendre sur son blog et de découvrir le reste de son travail. J'ajouterai que vous avez devant vous l'un des premiers textes d'un des grands écrivains de demain. C'est donc un plaisir et un honneur que de vous présenter ce "Une Nuit Auprès de Lupa" qui, je n'en doute pas une seconde, va vous enchanter autant qu'il m'a touchée. Un dernier mot pour remercier Marine de sa gentillesse et de sa disponibilité. Laissons maintenant la parole à Lupa...




Une nuit auprès de Lupa.


                                        J’aime l’endroit où je vis. Je ne sais pas si tout le monde peut en dire autant, mais, moi, je l’apprécie vraiment. Le temps y est doux, le paysage agréable, le gibier abondant. Et il est le théâtre d’un tas d’évènements passionnants.
                                        Je bondis sur le rocher le plus proche pour observer en contre bas ces étranges bipèdes, perchés sur leurs jambes. Leur ballet a un côté fascinant. Ils s’agitent dans tous les sens, on pourrait les croire désordonnés, mais il n’en est rien, au contraire. Leurs actions sont dictées par des valeurs qui m’échappent, mais tout a un but précis. De toute manière, cela me concerne peu. Du moment qu’ils n’empiètent pas sur mon territoire, je les laisse en paix. Sinon, ils goûteront à mes crocs avec bien des regrets…
                                        Je reste encore un long moment installée sur mon perchoir pour profiter de la brise qui court dans les airs. Pour un peu, j’en aurais jappé de plaisir, mais je ne suis plus un louveteau, alors je me retiens et je demeure digne.
                                        Je m’étire voluptueusement puis me secoue pour chasser les brumes ensommeillées qui commencent à m’engourdir. Vous pourriez trouver cela étrange, une louve seule, sans sa meute, mais c’est la vie que j’ai choisi de mener depuis la mort tragique de mes louveteaux, sauvagement et purement assassinés par ces affreux bipèdes. Je suis bien heureuse de ne pas leur ressembler ! Ils massacrent les miens et labourent la terre de profondes crevasses, des plaies qu’ils comblent avec de la pierre taillée. Ils s’établissent en faisant fi des hurlements désespérés de la nature.
                                        Oui, les humains ne sont pas des animaux, mais des monstres… Oh, bien sûr, ils ne sont pas tous ainsi. Je tolère notamment la présence de deux d’entre eux sur mon territoire, un couple de bergers. Je pourrais même dire que je les apprécie, ce qui ne m’empêche pas d’aller de temps à autre leur croquer quelques moutons. Il est d’ailleurs temps que je rentre chez moi, je n’ai que trop tardé dans les environs. Si je ne veux pas devenir la cible des pulsions meurtrières des hommes armés, j’ai tout intérêt à quitter cet endroit.

                                        Pour rentrer, je choisis de longer le Tibre. C’est un fleuve majestueux aux courbes pleines. J’adore y pêcher et m’y baigner, mais, suite aux dernières intempéries, il est en crue en ce moment. Alors, hors de question d’y mettre une patte, je tiens à la vie, tout de même !
                                        Je trottine un moment avant de m’élancer dans une course enivrante. Mes muscles roulent sous ma peau, je sens le vent dans ma fourrure alors que mes jambes puissantes me propulsent en avant. Avec nostalgie, je me souviens des pas maladroits de mes enfants, de leur air étonné lorsque je bondissais dans les airs pour fondre sur une proie puis de leur enthousiasme, de l’impatience que je lisais dans leur regard et leur envie de m’imiter. Connaîtrai-je encore semblable sensation de plénitude et de fierté ? Moi, louve déchue, traître envers ma meute, lâche et seule…
                                        J’atteins l’une des collines où j’ai élu domicile ces dernières années. Les hommes l’ont nommée Palatin, mais, pour moi, ce n’est qu’un amas de terre, de glaise, de boue et l’argile, le tout recouvert d’un épais tapis d’herbe grasse et verte. Quelle drôle d’idée de lui donner un nom… Quoique, les humains s’en donnent également entre eux. Encore une valeur incompréhensible. Mon regard erre dans l’horizon, il court sur les flancs des sept collines. Mon territoire, mon terrain de jeu, mon foyer… Je suis bien contente que ces bipèdes ne s’y soient jamais installés ! Beaucoup y passent, s’émerveillent, mais aucun n’a osé encore y déposer ses affaires pour y demeurer.
Après cette longue cavalcade, ma gorge est sèche. Pour réguler ma température, je sors la langue. J’ai l’impression de ressembler à un vulgaire chien ainsi, mais ça fait du bien, alors je mets ma fierté de côté.
                                        Je trottine tranquillement jusqu’au Tibre et j’immerge toute ma tête, gueule grande ouverte. Le courant est puissant par ici ! Je me retire bien vite, regrettant déjà d’avoir eu cette idée. Je grogne, mais, au moins, je suis désaltérée.
                                        Je m’apprête à regagner ma tanière quand d’étranges bruits attirent mon attention. Je renifle les alentours, à la rechercher d’une quelconque odeur, mais je n’arrive pas en percevoir. Intriguée, je cherche la provenance des gémissements. A quelle sorte d’animal peuvent-ils appartenir ? Je n’en ai pas la moindre idée, je n’en ai jamais entendu de semblables ! Ravie par l’idée de pouvoir mettre la patte sur un gibier nouveau, je m’en remets à mon ouïe pour me guider.
                                        J’ignorais encore à ce moment-là que cette rencontre allait à ce point me déchirer…

                                        Quand je trouve enfin la source du son, je m’en approche avec méfiance. Aucun effluve ne me parvient… Étrange. Quel animal est ainsi capable de masquer si aisément son odeur ? La curiosité aiguillonnée, je me dirige d’un pas alerte vers un figuier. Au creux de ses racines, j’y découvre les plus étranges… heu… choses qu’il m’ait été donné de voir. Il s’agit de minuscules créatures qui gémissent en agitant leurs membres potelés. Je les examine avec surprise. Pas de dents, pas de griffes, quelle pitoyable forme ! Je ne vais en faire qu’une bouchée !
                                        Elles ont les yeux clos et s’agitent dans la boue. Je vois leur peau lentement virer du rose au bleu, des marbrures violacées s’étendent sur leurs petits torses. Je marque un arrêt, reconnaissant aisément ces blessures. Ces bêtes semblaient avoir été battues… Je renifle, mais leur odeur est vraiment très faible. Je remarque alors qu’elles sont trempées. Viendraient-elles de l’eau ? Je doute fortement que de si petites choses puissent nager… En tout cas, cela expliquerait leur absence d’odeur, l’eau ayant dû les laver de toute senteur.  
                                        Les cris se font plus puissants tout à coup. Je sursaute, surprise par la force de ce vagissement. Une des deux créatures vient d’ouvrir les yeux. A ma vue, elle se calme et m’observe… puis se remet à hurler ! Je me couche sur le sol et gronde en retroussant mes babines. Je connais ce son, j’en suis certaine… Où ai-je déjà croisé semblable beuglement ? Ça me revient ! Alors que je traînais à proximité de la ville, j’ai vu une femelle bipède avec un de ses rejetons… La vérité me frappe alors de plein fouet. Des humains… Ce sont des humains…
                                        Je bondis sur mes pattes et observe les alentours avec inquiétude. Des chasseurs ? Y en auraient-ils qui se seraient risqués jusque-là ? Mais aucune trace de l’un d’entre eux… Allons bon, ces enfants ne sont pas venus seuls jusque-là ! A moins que… Mon regard dévie vers l’eau grondante. Le fleuve les aurait portés jusqu’ici ?
                                        Les bébés se sont tus. Je me tourne vers eux, méfiante. Ils ne bougent plus… Stupéfaite, je passe ma truffe sur le corps de l’un d’entre eux. Il est glacé ! Dans un flash, je revois les corps inertes de mes louveteaux à la robe maculée de sang. Ces enfants vont mourir, je le sens, mon esprit de mère le ressent au plus profond de lui-même.
                                        Mort… Cet écho funeste résonne dans mes oreilles. Ces petits êtres… Si pitoyables, si minuscules… Ils n’ont aucune chance de survivre. Quels parents seraient aussi inconscients pour les laisser seuls !? Quelle mère assez cruelle les aurait laissés tomber dans le Tibre ?! Je suis désormais furieuse. Je ne les laisserai pas mourir ! Pourquoi devraient-ils trépasser, là, misérablement faibles alors qu’ils n’ont encore rien accompli ? Alors qu’ils n’ont rien vécu ? Mes louveteaux non plus n’avaient encore rien vécu…


                                        Je n’ose les saisir par la peau du cou dans ma gueule de peur de leur faire mal. Je les déplacerai plus tard ! L’heure n’est pas à la réflexion ! Je me couche auprès d’eux de sorte à les caler contre la peau tendue et chaude de mon ventre. Puis, avec un certain dégoût avouerai-je, je passe ma langue sur leur figure. Les deux enfants se trémoussent à ce contact rugueux. Ils émettent un nouveau bruit, proche du gargouillement. Malgré moi, je suis attendrie. Mes coups de langue se font plus vigoureux alors que je lape l’eau et que je leur transmets ma chaleur grâce à mon souffle. Les bébés se laissent faire docilement. Je crois les entendre pousser un soupir d’aise !
                                        Je les vois soudain se mouvoir. Intriguée, je les laisse faire. Ils gigotent comme des vers, la bouche ouverte, le cou tendu vers le haut. Ils… font quoi ? Je glapis de surprise quand je sens une paire de gencives se refermer sur l’une de mes mamelles. Je gronde, furieuse, mais me tais soudain. Ils… tètent ? Oui, ils tètent ! Ces engeances humaines boivent mon lait ! Étrangement, je n’ai pas envie de les repousser. Non, je suis même… heureuse…  Les deux petits tètent goulûment, avec empressement. Ils devaient mourir de faim !
                                        Je les laisse faire, curieuse et touchée, protectrice et tendre. Presque comme si j’étais leur mère… Ce constat m’ébranle plus que je veux l’admettre. Je ne suis pas leur génitrice et je ne pourrai jamais l’être. Je suis une louve et eux… des humains… C’est évidemment impossible ! Si je les élevais, qui me dit que leur organisme tiendrait le coup ? Qui me dit qu’ils parviendront à survivre à cette dure loi qu’est la vie sauvage ? Rien… Absolument rien…
                                        Les mâchoires se desserrent et les corps s’affaissent. Affolée, je gémis et les lèche. Ils grognent un peu et se recroquevillent. Ils dorment… Soulagée, je pose mon imposante tête près d’eux pour, quelques instants plus tard, gagner le pays des songes.

                                        C’est un son particulier qui me tire des limbes du sommeil. Ce frottement… presque comme une mélodie… Le son d’un glaive tiré de son fourreau !
                                        Je bondis, parfaitement réveillée à présent. Face à moi se dresse un géant en armure rouge, un manteau jeté sur les épaules. Il tient d’une main une longue lance et de l’autre son arme blanche qu’il lève dans l’optique de l’abattre sur moi. J’aurais pu aisément bondir hors de sa portée et c’est ce que je manquai de faire, mais il y avait les enfants ! Je n’allais pas le laisser les assassiner ! Je me replie sur moi-même pour faire rempart de mon corps entre eux et le tranchant de cette langue de métal. J’entends le géant gronder puis son arme siffle dans les airs… pour s’arrêter à quelques poils de ma tête. Surprise, je rouvre les yeux que j’avais fermés sur le coup de la peur et le dévisage. Mon agresseur me sourit et me tend la main. Moi, naturellement, je fais de même. 

-    Que me vaut cette visite courtoise, seigneur Mars ? je lui demande non sans une note sarcastique dans la voix.
Le Dieu éclate d’un rire d’ogre. Je note que je suis sous ma forme humaine, une jeune femme revêtue d’une peau de loup. Nous avons donc quitté le monde terrestre… Que me voulait donc le Dieu de la guerre ?
-    Allons donc, Lupa, est-ce ainsi qu’on accueille son Maître ?
-    Je suis une divinité mineure, mais indépendante, seigneur Mars, je lui rappelle. Que me voulez-vous ?
Il désigne d’un geste de main les deux bébés qui dorment à mes pieds. Je fronce les sourcils. Comment des mortels peuvent-ils se matérialiser dans cette dimension ? C’est impossible ! A moins que…
-    Par le Styx qu’avez-vous fait ?
-    Tu as oublié “seigneur Mars”. N’oublie pas où est ta place, louve. 

Sa voix glaciale m’arrache des frissons qui fourmillent tout le long de ma colonne vertébrale. Je me retiens à grand peine de faire un pas en arrière. Hors de question de lui montrer ma peur !
Mars sourit, il sent l’effroi qui glace mes os et poisse mes reins, il s’en amuse. Il range son glaive dans un geste précis. 
-    Pas d’inquiétude, louve, je ne suis pas venu pour te pourfendre. Je suis rassuré que tu prennes la protection de mes enfants tant à cœur.
-    Vos… enfants ? je murmure, trop choquée pour penser à ajouter son titre.
-    Oui. Ils ont été jetés dans le Tibre par Amulius.
-    Amulius ? Le roi d’Albe-La-Longue ?
-    En effet. Ces enfants, vois-tu, sont des demi-dieux, fruits d’une nuit de passion dans les rêves d’une vestale du nom de Rhéa-Silvia.
 

                                        Qu’avait donc encore accompli ce Dieu à l’esprit plus tortueux que le pire des labyrinthes ? Une vestale ? Il avait mis une vestale enceinte ? Je n’ose même pas imaginer ce que cette pauvre femme doit subir à l’heure qu’il est !
-    Attendez, seigneur Mars, je réalise soudain. Ce nom… Rhéa-Silvia…
-    Oh, tu as l’air d’en savoir un peu plus que ce que je ne croyais, Lupa. Tu n’es pas aussi primitive que ce que laisse entendre Jupiter.
Je pense que c’est censé être un compliment…
-    Rhéa-Silvia est la fille de Numitor, le roi légitime d’Albe-La-Longue. Mais le trône lui a été volé par son frère, Amulius.
-    Si tu sais déjà tout ça, ça va me faciliter la tâche.
Les enfants choisissent pile ce moment pour se réveiller. Inquiète, je les prends dans mes bras pour les rassurer. Le Dieu, lui, n’esquisse pas un geste envers sa progéniture.  
-    Ces enfants sont, en toute logique, les descendants de Numitor, et donc les héritiers légitimes d’Albe-La-Longue, m’explique Mars. A leur vue, Amumlius les a fait jeter dans le Tibre pour s’assurer que personne ne viendrait lui reprendre le trône.
-    Mais ils ont survécu.
-    Oui, et en partie grâce à toi, Lupa.
Je me sens étrangement fière. Fière d’avoir pu protéger ces enfants, fière d’avoir accompli un si grand devoir. Alors ces deux bambins sont des princes…
-    Mais tu ne vas pas pouvoir les garder.
                                        Cette phrase est comme un coup de poignard en plein cœur. Je lève un regard hébété sur Mars qui, lui, impitoyable, me fixe, comme pour juger ma réaction. Je secoue la tête, espérant par cette action faire tomber de mon esprit toutes les pensées funestes qui s’y étaient installées. Je serre les crocs. Je viens à peine de rencontrer ces bébés, je ne peux pas déjà les avoir pris en affection !… N’est-ce pas ?  
-    Ils doivent être élevés par les humains, reprend tranquillement Mars. Et non par une louve. Un jour, ils iront restituer le trône à leur grand-père et ils créeront la plus grande cité qui ait jamais vue le jour. C’est leur destin.
-    P… Par qui doivent-ils être élevés, dans ce cas, seigneur Mars ?
Je souhaite vraiment qu’il n’ait pas aperçu le tremblement dans ma voix, ni les larmes qui menacent de jaillir de mes yeux. Pourquoi…
Pourquoi les humains doivent-ils une seconde fois m’arracher mes enfants ?
-    Il existe un berger qui vit dans les environs, un certain Faustulus. Il t’a vu secourir les enfants. Tu devras les lui remettre. Suis-je assez clair, Lupa ?
-    Bien sûr, seigneur Mars…
                                        Le Dieu de la guerre approuve d’un signe de tête silencieux avant de se dématérialiser. En un rien de rien, nous sommes de retour dans le monde terrestre.
Et je ne suis plus qu’une louve qui peut hurler à la lune.

                                        Faustulus est en train de prier les pénates quand un cri de surprise de sa femme le tire brutalement de sa méditation. 
-    Qu’y a-t-il, Larentia ?!
Il sort de son foyer en courant et trouve son épouse agenouillée à terre, tenant dans le creux de ses bras deux minuscules nourrissons. Elle lève un regard ému vers son mari.
-    C’est un miracle, murmure-t-elle.
Le berger a l’air surpris. Ne s’agit-il pas des enfants qu’avait recueillis la louve la veille ? Il avait eu trop peur d’intervenir sur le moment, désarmé face à ce monstre de musculature qu’était Lupa. Il la cherche des yeux et finit par croiser son regard, deux yeux fauves brillant dans l’ombre du Palatin. Et il comprend son attention. Un sourire naît sur ses lèvres, et il chuchote d’une voix si basse que même Larentia ne l’entend pas : 
-    Tout va bien, Lupa. Les enfants du seigneur Mars sont en sécurité ici.


                                                                       

Texte de Marine LAFONTAINE.

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